Séance inaugurale du séminaire (21 novembre 2014)

CFabregoule et GGD

Catherine Fabregoule (Université Paris 13 Sorbonne Paris Cité) : Le développement durable et la représentation du droit à l’eau dans le cinéma américain, L’exemple d’Erin Brokovitch de Steven Sodebergh (2000)

Basé sur une histoire vraie, le film met en scène une femme, mère seule élevant trois enfants, qui se bat seule contre tous (tel est aussi le sous-titre du film). Employée sans qualification dans un cabinet d’avocats, elle parvient à réunir les preuves de la contamination de la nappe phréatique de la petite ville de Hinckley en Californie par le chrome hexavalent rejeté par les usines de la société Pacific Gas et Electric. Motivé par sa salariée, le patron d’Erin Brokovitch entame avec succès une class action contre cette société ce qui permettra de délivrer aux familles victimes, de considérables dommages intérêts. L’affaire marquera l’histoire de cette procédure, alors que le droit français plus récent en la matière encadre davantage l’action collective de manière à ne pas transformer les citoyens en ‘consommateurs de justice’. La victoire d’Erin Brokovitch illustre à plusieurs titres les facette du rêve américain, mais le film met également en lumière les spécificités de la lutte contre une multinationale en mettant en évidence le problème du voile juridique entre la société mère et sa filiale.

Le film est le prétexte de montrer les évolutions de la conception et du système juridique américain qui a considéré l’environnement d’abord en termes de « conservation », puis plus tard en termes de « droit et de justice » pour conceptualiser ce que l’on appelle aujourd’hui la justice environnementale apte à défendre les droits de la personne dans son environnement …

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Erin Brokovitch

Geetha Ganapathy-Doré (Université Paris 13, Sorbonne Paris Cité) : L’eau comme enjeu du développement durable dans  deux films indiens : Thanneer Thanneer de K. Balachander (1981) et Dam/age d’Aradhana Seth (2003)

Mohandas Karamchand Gandhi fut un vrai pionnier du développement durable en déclarant que « la planète, l’air, la terre et l’eau ne sont pas des legs hérités de nos ancêtres mais des prêts accordés par nos enfants ». En occident, Léonard de Vinci considérait l’eau comme la force motrice de toute la nature. La fascination des britanniques pour les horizons nautiques était la base même de leur empire maritime. Pour le philosophe américain Henri David Thoreau, l’eau est l’œil de la terre. Pour le philosophe français Gaston Bachelard, l’eau est le substrat même de l’image. L’écrivain Arthur Clarke s’étonne du fait qu’on appelle la planète terre alors qu’elle n’est que l’océan.

Le mythe de l’arrivé du fleuve Ganges sur terre est à l’origine du conditionnement inconscient indien qu’il faut aller chercher l’eau en faisant des efforts surhumains. Il n’est donc pas étonnant que l’actuel ministère dédié aux questions de l’eau se nomme « Ministry of Water Resources, River Development and Ganga Rejuvenation ». Split Wide Open de Dev Benegal (1999), Water de Deepa Mehta (2005), Kaun Kitne Paani Mein de Nila Madhab Panda (2014) sont quelques films de fiction récents qui traitent de l’eau dans le sens littéral ou symbolique du terme. Paani de Shekar Kapur avec un scénario futuriste va bientôt sortir. Le documentaire d’Anne Feldman intitulé Water Pressures (2012) http://www.cultureunplugged.com/storyteller/Ann_Feldman#/myFilms est issu d’une rencontre entre les villageois du Rajasthan et les étudiants de North Western University (Evanston, Illinois). Le Bangalore film society avait organisé en mars 2014 un festival itinérant de films sur l’eau. http://www.voicesfromthewaters.com/2014/

KBfilm

Thanneer Thanneer de K. Balachander (1981) est film en langue tamoule marquant comme Mother India (1953, Hindi) qui montre que la période postindépendante est une traversée du désert pour le citoyen surtout quand il habite un village comme Atthipatti frappée par la sécheresse. Mais contrairement à Mother India, sa conclusion dément la vision de Nehru et en évidence l’eau comme enjeu majeur de la démocratie et du développement en Inde. Le film suggère que l’absence d’une bonne gouvernance crée les conditions pour l’éclatement d’une révolution citoyenne.

DamageImage

Dam/Age réalisé par Aradhana Seth (2003) https://www.youtube.com/watch?v=qlyZofTmUO4 est un documentaire qui dresse le portrait d’Arundhati Roy, figure de proue de l’altermondialisme en Inde et évoque la naissance de l’écoféminisme indien. Sa critique du pouvoir de la Cour Suprême indienne à légitimer les politiques de privatisation et d’ajustement structurel par rapport à la construction du barrage Sardar Sarovar sur le fleuve Narmada a valu à Roy un procès et un châtiment. Ce barrage est, à ses yeux, la métaphore d’une modernisation aveugle de l’Inde parce qu’il représente un élément centralisateur et producteur d’exclusion sociale et d’expropriation matérielle.

Royportrait

Comme dans l’exemple du barrage de Sivens, il existe deux camps en Inde, à savoir, ceux qui sont pour la modernisation et l’investissement public dans les grands projets et ceux qui défendent la biodiversité et la protection de l’environnement. Alors que la transition énergétique s’avère douloureuse pour la partie pauvre et vulnérable de la population, des Gandhis de l’eau comme Ayyapa Masagi ou Rajendra Singh œuvrent pour la récolte de la pluie et la restauration de la nappe phréatique plutôt qu’adhérer au projet officiel de Indian Rivers Inter-link. http://www.nih.ernet.in/rbis/india_information/interlinking.htm

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